Carnet d’aventure : Islande

6 juillet 2022 

15 jours seul en Islande

2016. Après avoir traversé les alpes de long en large, j’avais besoin de changements et de challenges. Un nouveau climat, de nouveaux paysages… L’islande était pour moi cette terre promise ! Du changement, mais pas trop. Disons que j’étais plus préparé à affronter un orage polaire qu’une meute de loups.

Vatnajökulsþjóðgarður

Paris – Reykjavick – Friðland að Fjallabaki. 3h30 d’avion à fuir le coucher de soleil, une nuit sur un banc à attendre le bus … et me voilà parachuté dans les Highlands Islandaises.

Un ciel gris, un sol noir, une pluie continue. Avec pour seul son le grondement des torrents. Jour 1. Jour 2. Jour 3…petit à petit, de silence en silence, de goutte en goutte…j’avançais, jusqu’à cette nuit, la nuit 5.

Je m’étais recroquevillé sous un rocher en haut d’une falaise. Un abri précaire qui me préservait des rafales de vents et de cette incessante pluie. Mon seul horizon à traverser la brume, le glacier Vatnajökulsþjóðgarður. En bas, presque invisible sous les nuages, un fleuve sauvage aux centaines de bras ondulants. C’est ici que éreinté par le climat, je me suis endormi, ouvrant grand la porte aux rêves. Chaque jour, cette porte s’ouvrait avec plus de force et peinait à se refermer…laissant pénétrer dans le monde réel mes créatures magiques. Après plusieurs jours de silence, sans croiser un seul être vivant votre cerveau re invente son monde.

Au réveil d’un rêve puissant peuplé d’étranges petits êtres, je me suis jeté dans ce fleuve avec pour mission de le traverser à gué. Une traversée de 20minutes…de bras en bras…à tenir le cap tout en se laissant porter par l’eau en furie. 20min nécessaires à cette pluie incessante pour disparaitre. De l’autre côté, il faisait beau. Le vent s’était levé. Et c’est ici, en plein soleil, face à l’immense calotte glaciaire de Vatnajokull, que j’aie lâché prise.

Le lac, l’abeille et la paquerette

Après une journée abattu, allongé entre deux rochers noir, j’ai mis de côté tout objectif de performance. Désormais, mon seul objectif était d’errer dans ce désert noir, direction plein Ouest ! Je me laissais porter, ou plutôt, je me trainais contre le vent avec une atroce douleur à la cheville. Les bourrasques étaient violentes et me giflaient de sable noir. Je passais les nuits dans d’anciens cratères volcaniques jusqu’à ce petite lac paradisiaque lové entre deux montagnes.

Un abris de fortune semblait m’attendre. C’était le 7e jour et ma première sieste au soleil, j’avais presque chaud. C’est à cet endroit et à ce moment que tout a commencé à se mélanger. J’étais ici, ailleurs, et partout. J’étais à la fois allongé au soleil sur le sable noir et dans une pâquerette qui se faisait butiner par une abeille à l’autre bout du monde. Pour la première fois de ma vie je voyais et ressentais deux réalités. Bref ! Une sensation extreme de plénitude, au milieu de cet enfer noir sans vie.

S’en est suivi deux jours de marche pour rejoindre la piste et faire du stop jusqu’à Reykjavick. J’avais tellement soif de monde, que j’ai décidé de dormir dans un camping pour faire une pause dans mon aventure.

Les mouches et le glacier

Un bain de foule et me revoilà d’aplomb pour une nouvelle aventure ! Avec le retour à la vie, les rêves s’étaient envolés. La région de Langjokull certainement plus douce à la vie était couverte de grandes étendues de tourbes, paradis des moutons et des mouches.

Il faisait beau, chaud, humide. Un nouvel enfer, celui des nuées d’insectes. Mon objectif était tout en haut, loin des nuées, battu par les grands vents ! Je voulais dormir sur la calotte glacière de Langjokull. Une ascension de deux jours très calme, si l’on oublie la mitraille des orages de grêle qui balaient sans relâche ces grandes étendues noires. Un soir vers 22h, un 4×4 s’est arrêté pour me demander si j’étais perdu. Non, j’étais sur mon chemin, même si à pied et à contre sens. Vive la liberté !

Après cette nuit de glace au panoramas hors norme, je suis redescendu calmement de ma montagne. Au détour d’un ruisseau, j’ai à nouveau vécu une anomalie. J’entendais les cloches de l’église de mon village en lorraine. Etrange sensation d’être à deux endroits au même moment…6h de marche plus tard, bus, touristes, avion, Paris, RER, versailles. Retour à la vie réelle.

FIN

Atelier de paysagistes concepteurs pour jardins naturalistes